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01/08/2023 - Livres Hebdo
Dans la grande tradition

On connaît les missions officielles de l'Imprimerie nationale. On sait moins qu'elle abrite en son sein un atelier du livre d'art et de l'estampe, qui reste à la pointe des technologies de confection d'ouvrages. Nous avons eu la chance de visiter ce site. Suivez nous.

Depuis le déménagement de l'Imprimerie nationale de son site historique du 27, rue de la convention (Paris XVe) et après quelques pérégrinations, son atelier du Livre d'art et de l'Estampe a rejoint le site non loin de Douai, ouvert en 1974, 20 hectares, 90 000 m² de bâtiment, 700 collaborateurs parmi les 2 000 du groupe. L'Imprimerie nationale (qui arbore le logo IN groupe depuis 2018) est une société anonyme à capitaux entièrement d'État, dépendant du ministère des Finances via l'agence des participations de l'État. Sa mission principale est la protection des identités et des données personnelles, ainsi que la réalisation de tous les titres d'identité et papiers administratifs (carte d'identité, passeports, cartes grises, permis de conduire…), dont elle a le monopole. Son activité éditoriale « grand public », elle, a été cédé à Actes Sud.

L'atelier est l'héritier de la toute première « structure » typographique, institué en 1538 par François Ier avec la création, par le graveur Claude Garamond, d'une police de caractère exclusive pour le grec ancien. Le caractère sera redessiné ensuite, sur ordre de Richelieu, en 1640. Il n'a plus changé depuis. Il fait partie des collections de l'atelier : 700 000 pièces typographiques dont 460 000 pièces gravées, classées monuments historiques, auxquelles s'ajoute une bibliothèque de 35 000 volumes, du XVIe siècle à nos jours. Le plus ancien étant un incunable de 1498, l'édition vénitienne par Alde Manuce des comédies d’Aristophane. L'atelier réalise tout type d'impression traditionnelle, avec composition manuelle, ainsi que des gravures : lithographie, taille douce … Il conçoit aussi des ouvrages de bibliophilie, des livres d'artistes, commandés soit par des éditeurs spécialisés (comme Dumerchez), des sociétés de bibliophilies, ou par des artistes eux-mêmes. Là aussi, on travaille « à l'ancienne », on cultive le goût de la perfection et on sait prendre son temps : 3 à 5 livres d'artistes par an seulement « sortent » de l'atelier de Douai. Le dernier en date, fin 2022, étant un roadbook de Kenneth White, parti au Japon sur les traces du poète Bashô, un des maîtres du haïku : les Cygnes sauvages, illustré de photographies de sa femme Marie-Claude White. L'ouvrage, publié aux éditions Leal Torres, a été tiré à 35 exemplaires, dont 5 hors commerce numéroté, tous justifiés et signés par l'auteur et par l'artiste. Son prix : 3 500 euros.

Le mémento complet des signes de correction, en vigueur dans la presse et l'édition
Les bibliothécaires inspectant les ouvrages
L'une des machines pour l"impression en taille-douce, travaillant sur la cantate des cantates, de Frank Lalou, illustré par Albert Woda

L'Imprimerie nationale, plus qu'une entreprise, est une institution qui, au gré de ses métamorphoses, a su intégrer des innovations technologiques dont elle est à la pointe (dans le numérique, en particulier), tout en participant à notre « exception culturelle ». Elle maintient des savoir-faire uniques au monde et cette grande tradition qui remonte à François 1er. Preuve en est : la salamandre, l'animal totémique du monarque, demeure depuis des siècles l'emblème de l'Imprimerie nationale, laquelle se nomme ainsi définitivement depuis 1870.