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06/08/2023 - La Voix du Nord
Un des uniques fondeurs de caractères est à l’Atelier du livre d’art

Nous vous emmenons à la découverte de l’Atelier du livre d’art et de l’estampe de l’Imprimerie nationale à Flers-en-Escrebieux. Après la gravure de poinçons, rencontre aujourd’hui avec Philippe Mérille, maître d’art et fondeur de caractères.

Si vous avez suivi nos précédents volets, vous aurez donc (re)découvert que l’Atelier du livre d’art et de l’estampe, dont le musée est ouvert ponctuellement au public, est l’une des dernières chaînes graphiques du livre imprimé encore en activité. À Flers-en-Escrebieux, ce site qui appartient à l’Imprimerie nationale emploie dix personnes. Chaque année, deux livres d’artistes numérotés sont imprimés en cinquante exemplaires chacun comme au temps de Gutenberg.

« Chaque année, deux livres d’artistes numérotés sont imprimés en 50 exemplaires. »

Dernièrement, nous vous présentions les poinçons, pièces classées aux monuments historiques. Le poinçon, gravé à la main, reprend précisément le dessin des caractères. Une fois fabriqué, il est ensuite durci pour venir frapper un bloc de cuivre et obtenir une matrice, un moule en quelque sorte. La lettre pourra ainsi être fondue à l’infini… C’est ici que Philippe Mérille, maître d’art et fondeur de caractères, entre en piste. Il est aujourd’hui l’un des derniers en Europe à maîtriser ce savoir. Le site de Flers est d’ailleurs l’une des dernières fonderies de caractères à fonctionner. « Je suis entré à l’Imprimerie nationale en 1990, mais je suis ici depuis 2005, explique ce passionné. La filière plomb était un paradis perdu. J’ai fait le chemin inverse. » Pour continuer à faire vivre ce patrimoine, il forme d’ailleurs un nouvel élève, Christophe Koopmans.

Comme au temps de Gutenberg

C’est donc dans une ambiance de cliquetis quasiment incessants que Philippe Mérille joue sa partition avec le procédé inventé, en Occident, par Gutenberg en 1450. « Il a inventé le procédé de lettre unique et de qualité. Il a créé la typographie qui a démocratisé le livre et qui va inonder l’Europe. » Si la fonte a d’abord été manuelle, les machines vont plus ou moins être mécanisées par la suite pour connaître un véritable progrès au milieu du XIXe siècle. Il travaille entre autres sur une fondeuse-composeuse, une très vieille machine qui va produire des caractères d’imprimerie à base de plomb porté à haute température. « C’est à peu près à 360o C », explique-t-il. La machine, dont le rouage peut parfois être capricieux, sort tout à coup presque comme par magie des lettres, puis des mots et des lignes. Encore un nouveau maillon de la chaîne avant correction, puis impression.